Un musée d’anatomie au coeur de l’école vétérinaire
Histoire du Musée
Le Musée d’anatomie de l’Ecole Nationale Vétérinaire de Toulouse réside depuis 1964 dans le quartier de Lardenne sur le site des Capelles. Il recèle des anciennes collections qui ont survécu au déménagement de l’école originelle située dans le quartier de Matabiau depuis 1835. Celle-ci abritait alors plusieurs petits musées, certaines collections étaient exposées dans les chaires.
Les moulages de Montané
Paul Lucien Montané (1858-1916) s’est beaucoup investi dans son rôle de professeur d’anatomie. Il a révolutionné l’enseignement anatomique en proposant à ses élèves des moulages en adéquation avec ses méthodes. Fabriqués en papier mâché, ces moulages font ressortir avec une extrême précision les moindres détails anatomiques, de la chair disséquée jusqu’aux différents nerfs. Portant principalement sur le cheval, ces moulages n’étaient pas faits pour être manipulés. Ils étaient exposés et utilisés comme outil pédagogique visuel dans les salles de dissection. Montané a obtenu en 1914 une subvention de la fondation Loutreuil de 1000f (~3348,90€) pour réorganiser les collections anatomiques du musée.
Le cheval du Docteur Auzoux
Comme chaque école vétérinaire de France, l’ENVT possède son cheval en papier mâché provenant de l’usine du Docteur Auzoux (1797-1880), un brillant entrepreneur et médecin normand. Ce cheval est issu d’un savoir-faire unique : un mélange de poudre de liège avec du blanc de Meudon, du papier et de la filasse, le tout renforcé par une armature métallique. Sa date de production (1851) est écrite à la main, sur le côté droit, accompagnée de la signature du Docteur Auzoux. Ce cheval est dit « complet » car chacun de ses muscles peut être isolé. La restauration de cet emblème de l’anatomie artificielle est devenue aujourd’hui indispensable.
Des objets à manipuler
Une multitude d’os provenant de divers animaux est mise à la disposition des étudiants toute l’année pour leurs révisions d’ostéologie. Les divers segments des squelettes sont classés et posés sur les grandes tables du Musée. Le visiteur peut alors manipuler les os, sentir leur poids et prendre toute la mesure de l’anatomie animale. Ici point de panneau « Interdiction de toucher », mais prenez soin de remettre les os à leur place!
L’Histoire de l’art vétérinaire est marquée au sceau par la fondation de la toute première Ecole Royale Vétérinaire en France le 5 août 1761. Elle voit le jour à Lyon grâce à Claude Bourgelat, écuyer du roi Louis XV et avocat de formation. A la tête de l’Académie royale d’équitation de Lyon, il plaide la cause animale, surtout celle du cheval. Bourgelat propose que la pathologie équine soit enseignée. Instrument de guerre prestigieux et moyen de transport indispensable, le cheval est le centre des préoccupations de la société du 18e siècle.
C’est aussi en mettant l’accent sur l’épizootie qui ravage les bovins et ovins qu’il parvient à convaincre de créer une école. Cinq plus tard, une deuxième école est inaugurée près de Paris, dans le château d’Alfort.
Malgré de nombreuses requêtes et pétitions, Toulouse n’obtient le droit de construire son école que 75 ans plus tard : le 22 août 1835, l’Ecole Matabiau est inaugurée et dés 1899 le Ministre de l’Agriculture est à la recherche d’un nouveau terrain pour le transfert de l’école
car le quartier de Marengo évolue au rythme de la construction de la gare. En effet, le bon fonctionnement de l’école se heurte à l’urbanisation croissante. Mais en 1914, la question d’un transfert devient urgente car l’autorité militaire investit les locaux pour y installer le Centre de production de sérums de l’Institut Pasteur de Garche. Sans compter qu’en 1939, les Services de Recherches du Ministère de l’Air s’emparent du bâtiment. Ces derniers s’engagent à reconstruire un autre bâtiment pour l’enseignement vétérinaire.
Mais leur promesse n’est pas tenue. A la fin des années-cinquante un nouveau projet est enfin validé, porté par l’Inspecteur Général Petit et le Directeur Pons. Un terrain de 41 hectares est acquis par le Ministère de l’Agriculture, chemin des Capelles. Les démarches des acteurs du monde vétérinaire et du Conseil Municipal aboutissent enfin, car la société a évolué : en effet, la nouvelle importance de l’élevage ou encore l’augmentation du besoin en produit d’origine carnée font que la construction de cette école est indispensable. En 1964, la première rentrée scolaire à l’Ecole dite « des Capelles » a lieu.
Paul Lucien Montané, père de l'anatomie régionale
Paul Lucien Montané (1858-1916) est né à Lavelanet-de-Comminges, fils d’un père forgeron qui devient maire de Lavelanet en 1882 et d’une mère au foyer. Il s’est très vite fait remarquer en arrivant premier lors de son admission à l’école vétérinaire de Toulouse. Il confirme ses compétences en arrivant six fois premier de sa promotion sur les huit semestres de ses quatre années d’études.
Lors de ses résultats aux deux concours pour devenir professeur il est décrit par Gustave Barrier, professeur puis directeur à l’école vétérinaire d’Alfort, comme un « technicien habile et un érudit » qui « excelle en histologie et en anatomie » et est bien plus jovial que ses compétiteurs. Il se montre « particulièrement remarquable » dans sa pratique de l’extérieur.
C’est donc naturellement qu’il devient professeur d’anatomie et d’extérieur en 1887 à Toulouse. Il sera fait ensuite officier du Mérite agricole en 1898, Chevalier de la Légion d’honneur en 1901, officier d’Académie en 1907 et sera même maire de Lavelanet-de-Comminges en 1911 tout comme son père. L’anatomie régionale telle qu’on l’enseigne aujourd’hui résulte d’une technique née à l’école vétérinaire de Toulouse.
Très vite Montané va s’intéresser à l’extérieur de l’animal comme en témoigne son ouvrage sur « L’Extérieur du Cheval par Montané » (1903) où il expose déjà sa vision en montrant la nécessité d’étudier l’anatomie régionale. Ainsi, cette technique est initiée dès 1900 par Montané et son élève Bourdelle. Tout deux vont révolutionner l’enseignement vétérinaire en sortant l’ouvrage sur l’ « Anatomie régionale des animaux domestiques. Tome I : Le Cheval » (1913). Pour eux, c’est ensemble dans une région du corps que les organes doivent pouvoir être évoqués, afin par exemple, d’obtenir un diagnostic par un clinicien.
L’idée était de reprendre l’ouvrage de Chauveau sur l’ « Anatomie comparée des animaux domestiques » qu’il considère comme fondamental pour l’anatomie vétérinaire, mais d’en ressortir un savoir mieux adapté aux nécessités de la pratique médicale. Les critiques sur les dessins sont toutes favorables, cependant certains comme G. Barrier n’adhère pas à l’idée générale qui est de substituer la notion utilitaire des rapports à la notion fonctionnelle de l’organe. Pour Montané, l’ancienne notion était devenue trop raisonnée et scientifique jusqu’à tomber dans un empirisme routinier.
L’anatomie régionale n’est plus enseignée à Toulouse mais grâce à ses disciples Edouard Bourdelle et Clément Bressou, qui sont allés enseigner à Alfort, l’anatomie héritée de leur maitre perdure encore aujourd’hui.
Mais qui donc est le Docteur Auzoux?
Tout commence en 1822, lorsque Louis Thomas Jérôme Auzoux (1797-1880), présente à l’Académie royale de médecine un procédé de fabrication en papier mâché qui révolutionne la pratique de l’anatomie artificielle.
Présentant d’abord avec succès des modèles humains, entièrement démontables, il diversifie sa production en fabriquant des organes, des animaux et des plantes.
Tel que le raconte Christophe Degueurce dans son ouvrage « Corps de Papier » aux Editions de la Martinière, il s’agit d’un étudiant brillant, fils de cultivateurs aisés, qui s’intéresse très vite à la question de substituer les cadavres dans le cadre des dissections. Il s’agit en effet d’un enjeu majeur pour les médecins de l’époque car il n’existait pas encore de produits anti-infectieux et à la moindre coupure d’un scalpel souillé, ils risquaient de s’infecter gravement au cours de leurs dissections.
C’est en 1834 que l’anatomie artificielle du Dr Auzoux prend le qualificatif de « clastique ». Dérivé de sa racine grecque, le terme veut dire « rompre » ou « briser ». C’est donc une pédagogie par le morcellement qu’il conçoit, une forme de didactique sensorielle. Il monte sa propre usine de modèles anatomiques dans son village natal, Saint-Aubin-d’Escroville. Le Dr Auzoux forme ainsi ses ouvriers à la confection délicate de ces pièces. Il s’agit en fait d’un alliage de poudre de liège avec du blanc de Meudon, du papier et de la filasse, le tout renforcé par une armature métallique. C’est ainsi, en véritable entrepreneur, qu’il décide de pourvoir à un besoin majeur du corps médical du 19e siècle.
Aujourd’hui ces pièces sont dispersées dans le monde entier. La plupart d’entre elles sont vouées à l’abandon, considérées comme désuètes, d’autres rachetées à des milliers d’euro. On en retient leur caractère esthétique et poétique mais il ne faut pas oublier qu’il s’agissait d’objets didactiques et qu’ils ont servi à former nombre de médecins.
Venir au Musée
Ouvert sur demande
Le musée est ouvert sur demande aux étudiants de l’ENVT.
Le Musée d’anatomie est un espace particulièrement dédié à la pédagogie, idéal pour les enfants. De plus, une multitudes d’os sont mis à disposition afin d’être manipulés. A cet effet, des visites pour scolaires seront prévues courant 2015. Le département d’anatomie proposera des visites commentées ainsi que des fiches pédagogiques.
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